
Comment se passe Noël en Irlande ? Que se passe-t-il dans les familles ? Voici ce que j’ai pu tirer de discussions avec des personnes que je connais et de farfouilles sur des sites en anglais.
Tout d’abord, il faut savoir que les Irlandais ont droit à deux jours fériés pour Noël : le 25 et le 26 décembre. Si vous êtes en Irlande pendant cette période, faites vos réserves. Les magasins et les restaurants sont pour la plupart fermés pendant ces deux jours. Les pubs sont fermés le 25. Et si par chance, un supermarché est ouvert, il n’a pas le droit de vendre d’alcool le 25. Comme pendant le Vendredi Saint.
Le 24 décembre : rien…
Chez nous, il y a le traditionnel réveillon. Miam !! Ici… rien ! Eventuellement, la messe à 23h. Et encore, ça dépend des endroits. Dans certaines familles, les enfants peuvent avoir un premier cadeau. S’ils ne vont pas à la messe, les Irlandais aiment rester bien au chaud au coin du feu. Ils revêtent des pyjamas « de Noël » (avec des dessins de Noël), des chaussettes douillettes et ils se matent un film en grignotant des trucs.
Passons directement au 25.
Le 25 décembre : Noël
Noël est une journée très remplie ici.

Bien entendu, comme dans beaucoup d’autres pays, Papa Noël est passé amener des cadeaux dans la nuit pour toute la famille. Les cadeaux attendent bien sagement les enfants au pied (voire dans) le sapin. De petits cadeaux sont aussi cachés dans de grandes chaussettes accrochées dans le salon ou au pied du lit. Les fameuses chaussettes que l’on voit souvent dans les films américains ou des images de Noël. Ils les appellent les « stocking ». Les cadeaux sont en général des babioles et des friandises. Les gros cadeaux pourront être ouverts en plusieurs sessions, entre le 25 et le 26 mais ça dépend vraiment des familles. Ca doit être un supplice !!
Le matin, on prend donc un rapide petit déj’, puis, on fait une première session d’ouverture de cadeaux.
Puis, on va à la messe. L’heure dépend, bien sûr de la paroisse… Elle peut être à 8h comme à 11h.
Vers 11h, on mange un gros scone avec du thé. Le scone est une sorte de pain sucré en portion individuelle, que l’on coupe dans le sens de l’épaisseur et que l’on tartine allègrement de beurre et de confiture, voire de crème fraîche.

Après la messe, on va se baigner ! Enfin, les courageux… Les autres regardent dans leur doudoune. C’est « the Christmas Swim« . Un plongeon dans la mer avec les copains, une petite nage et hop, on court vite au pub se réchauffer avec un hot whiskey (un grog au whiskey) ! Faut dire que l’eau est à environ 10°C en cette période de l’année ! Souvent, les nageurs récoltent des fonds pour des oeuvres de charité.
Puis, on rentre à la maison préparer le repas et jouer un peu avec les cadeaux.
A 3h, toute la famille passe à table pour le repas. On finit bien rempli jusqu’aux oreilles. Au menu, dinde farcie, avec une sauce faite avec le jus de cuisson ou avec de la canneberge (ou cranberry), servie avec des pommes de terres rôties et des légumes, dont des choux de Bruxelles (va savoir pourquoi ils s’obligent à manger ces machins à Noël…). Puis il y a le Christmas Pudding. L’oie est plus traditionnelle que la dinde, qui est plutôt originaire des USA (pas la dinde dans l’assiette, la tradition de la manger !). Toutefois, j’ai l’impression que l’on trouve plus de dinde que d’oie dans les magasins.
On refait éventuellement une session de déballage de cadeaux et on va se coucher !
Le 26 décembre : la St Stéphane
La St Stephane est un jour plus calme. Mais on ne s’ennuie pas quand même. Tout dépend de l’endroit où vous habitez en fait…
On mange, le plus souvent, les restes de la veille (ou on finit de digérer…). A Cork, principalement, ils mangent le rôti de boeuf aux épices, qui est une recette locale. C’est très fort en goût ! On en trouve toute l’année, si jamais vous passez par là et que vous voulez goûter.
Il y a trois grands événements lors de la St Stéphane qui ont lieu un peu partout en Irlande : la chasse à courre au renard, la « chasse » au roitelet et le début des soldes d’hiver. Si vous habitez à Dublin, vous pouvez assister aussi à la grande course hippique de Noël, qui rassemble chaque année près de 20 000 spectateurs. Et sinon, on peut trouver des petites fêtes de village un peu partout. Par exemple, à côté de chez moi, il y a un défilé de véhicules « vintage » et une course de tracteurs dans un autre village (non, vous ne rêvez pas…). Et devinez où tout cela se termine ! Au pub, of course !!
Le 26 est donc le début des soldes. Pourquoi est-ce remarquable ? Parce que le 26, c’est plutôt une grande braderie. Des méga promos sont proposées, dès 6h du matin ! Alors les gens commencent à faire la queue dans le froid et sous la pluie dès 3h du mat devant les grandes enseignes pour être sûr de rafler l’article tant rêvé à -70%. Il n’y a pas que quelques personnes qui se mettent en rang à cette heure là, mais des files entières ! C’est dingue !!! Ils sont fous ces Irlandais…

Bref, comme je le disais, il y a traditionnellement une chasse à courre organisée le matin du 26, dans les régions où un groupe de chasseur est présent. Pour en savoir plus sur la chasse à courre, lisez mon article spécifique. Les non chasseurs peuvent assister au départ, au retour de la chasse ou suivre les chasseurs en voiture, à pied, à cheval ou en autre moyen de locomotion (quad, vélo…). Et bien sûr, ils peuvent aller boire un coup au pub avec les chasseurs… N’oublions jamais le pub en Irlande.
–Puis, dans de nombreux endroits, on célèbre la chasse au roitelet. La St Stephane est aussi appelée « Wren Day« , le jour du roitelet. Il s’agit d’une petite parade où des hommes déguisés avec des masques, des vêtements de couleur, un manteau, une jupe et un chapeau pointu en paille se promènent avec un roitelet (un faux maintenant) attaché en haut d’un poteau décoré de rubans. Il fut un temps où un roitelet était tué et cloué au poteau. Heureusement, les moeurs se sont adoucies… Les plus grosses parades se trouvent à Dingle et à Listowel (Kerry).

Jusque dans les années 1930, les garçons « chasseurs », appelés Wrenboys ou Mummers, défilaient au son de la musique irlandaise en chantant et faisaient la quête pour, soit-disant « enterrer l’oiseau », mais en fait pour financer un bal le soir même. L’Eglise catholique a vu d’un mauvais oeil cette tradition menant à la « débauche » nocturne et a essayé de la faire oublier. Le recul de cette tradition a été accentué par les fortes émigrations du XXème siècle. Mais, grâce à la persévérance de certains groupes, elle a survécu jusqu’à aujourd’hui et reprend petit à petit de l’ampleur.
Alors, pourquoi chassent-ils le roitelet ? Le roitelet aurait eu beaucoup d’importance dans les rites druidiques au temps des celtes (environ -500 à +500 ans). Les oiseaux, de manière générale, étaient vus comme des intermédiaires entre le monde des Humains et le monde des Dieux. Plus haut ils volaient, plus près des Dieux ils étaient. Le roitelet a toujours eu une réputation de « tricheur ». L’un d’entre eux se serait caché dans la queue d’un aigle (l’oiseau qui vole le plus haut pour les Celtes), et serait passé au dessus de lui une fois l’aigle arrivé à sa hauteur maximale. Les druides se servaient donc de lui pour prédire les augures (et donc, lui fouillaient les entrailles), car il serait l’oiseau le plus près des Dieux. Le nom irlandais du roitelet signifierait « l’oiseau du druide ».

On raconte aussi qu’un roitelet aurait trahi des soldats Irlandais cachés dans des fourrés pour tendre une embuscade à des Vikings. Du coup, les Irlandais l’ont un peu pris en grippe… Il semblerait aussi que St Stéphane ait été trahi par cet oiseau. Décidément, ce pauvre piaf a du monde sur le dos ! Et voilà qui expliquerait pourquoi il est chassé et cloué au pilori à la St Stéphane en Irlande.
Plusieurs chansons et musiques évoquent ce jour de chasse un peu spéciale. Vous pouvez voir les vidéos en cliquant sur les liens ci-dessous :
The West Clare Wrenboys (ça vaut le coup d’oeil !)
Wren in the Furze (par The Chieftains)
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